Pourquoi t'es toujours en noir ?

Un tournant brutal dans l’innocence de l’enfance
La perte de mon petit frère a été un tournant dans ma vie, un moment où l’innocence de l’enfance a été ébranlée par la réalité cruelle de la mort. À l’âge de onze ans, je me suis retrouvée à prendre soin de lui pendant que nos parents étaient au travail. C’était parfois difficile pour moi, jongler entre mes propres désirs d’enfant et mes responsabilités de grande sœur.
Il y avait des jours où je souhaitais secrètement qu’il « disparaisse », pour que je puisse avoir plus de liberté, pour que je puisse être comme les autres enfants de mon âge. Je me rappelle avoir poussé son landau (autre temps, autres habitudes 😉 ) le plus loin possible, pour ne plus le voir. Mais jamais je n’aurais imaginé que ces pensées pourraient se réaliser de la manière la plus douloureuse qui soit.
Le poids du deuil et de la culpabilité
Sa mort après de longs mois de lutte à l’hôpital a laissé un vide dans nos vies, un vide que rien ne pourrait combler. Au début, je me suis sentie coupable, persuadée que mes pensées avaient causé sa disparition. C’était une charge lourde à porter pour une enfant de onze ans.
Alors j’ai « pris le noir », comme on adopte un style, mais pour cacher ma honte et ma culpabilité. Longtemps, jusqu’à ce que je comprenne que c’était ridicule, irrationnel ; que la punition avait assez duré.
L’importance du soutien pour les enfants en deuil
S’en dégage une réalité troublante : celle du manque de soutien psychologique pour les enfants confrontés à la perte d’un être cher, d’un animal de compagnie, d’un instituteur. Trop souvent, les enfants sont laissés pour compte dans leur processus de deuil, leurs émotions étouffées ou ignorées, car les adultes pensent qu’ils ne comprennent pas ou qu’ils sont trop jeunes pour ressentir la douleur de manière significative.
Cela a été mon cas. Mes propres luttes émotionnelles ont été ignorées, reléguées au second plan dans le tumulte du chagrin familial. Il n’y avait pas de place pour mes questions, mes peurs ou mes remords. Pas par maltraitance mais par ignorance.

La mort de mon petit frère m’a appris à apprécier chaque instant précieux que nous avons avec ceux que nous aimons, à ne jamais prendre la vie pour acquise. Et même si son absence laisse un vide dans nos cœurs, je sais que son esprit vivra toujours en moi, comme une étoile brillante dans le ciel de mes souvenirs. Et je souhaite ardemment que les enfants confrontés au deuil puissent bénéficier du soutien et de l’écoute dont ils ont désespérément besoin pour surmonter cette épreuve.